28 mars 2009 6 28 /03 /mars /2009 18:20

Le malheur des uns faisant le bonheur des autres, je devrais me réjouir, moi qui accompagne les restructurations et le retour à l’emploi. Car les Plans sociaux ou PSE (Plans de Sauvegarde de l’Emploi) fleurissent dans cet immense maelstrom économique ! Hé bien non, cela me met en fureur. Ce qui pouvait être acceptable jusqu’alors (accompagner les salariés dans un reclassement dynamique en cas de justes restructurations) l’est de moins en moins. Car que voit-on ? D’un côté, un manque incroyable de préparation des salariés qui sont « invités à sortir » et de l’autre, un marché de l’emploi qui se réduit comme une peau de chagrin. Un effet de ciseau mortel et terriblement anxiogène dont il est urgent de sortir ! Des moyens existent mais mon métier ne peut se substituer, seul, à ceux qui ont la charge de préparer l’avenir des salariés et celui du marché.

Les salariés sont en effet mal préparés sur les deux sujets principaux permettant de rebondir : une vraie réflexion sur leur valeur ajoutée et sur leur capacité relationnelle. A quoi s’ajoute le plus souvent un problème de niveau d’employabilité dont, généralement, ils n’ont pas conscience. Quelles sont en effet les compétences dont ils disposent ? Quelles sont leurs vraies motivations ? Et quelle est leur personnalité ? Au fond, trois questions simples sur lesquelles ils n’ont pas consacré une minute de réflexion, pas plus que leur entreprise d’ailleurs, pour mieux aborder l’étape suivante, même après 20 ans d’expérience professionnelle. Sur leur capacité relationnelle, le constat n’est pas meilleur : dans neuf cas sur dix, les salariés sont seuls, loin de leurs pairs, coupés du monde et de leurs relais naturels, y compris dans leur propre entreprise. Qui plus est, ils sont handicapés sur le « comment faire ? » pour activer les quelques liens dont ils disposent. Ce n’est pas un hasard si l’on parle tant de réseau dans les journaux…. Enfin lorsqu’un problème d’employabilité se pose, c’est toujours au moment de passer l’obstacle ! Avec un bilan de compétences sous-utilisé, une gestion des carrières quasi inexistante et une formation qui forme avant tout les mieux formés, il faut dire que l’entreprise a sa part de responsabilité dans ce manque cruel de préparation.

Quant au marché de l’emploi, il est terrifiant ! D’un côté, les besoins d’un monde nouveau n’ont jamais été si importants (bâtiments intelligents et propres, transports non polluants, développements technologiques de toutes sortes, aides à la personne, demandes des pays émergents propices à nos exportations, etc.) ; et de l’autre côté, une économie traditionnelle qui se meurt en douceur sans aucun projet alternatif. Il suffit de songer, pour s’en convaincre, aux moyens puissants des grands groupes du CAC 40 et à leur si faible capacité à produire de nouvelles idées, de nouvelles activités, de nouvelles richesses. Ce qui a primé chez eux depuis de nombreuses années, ce n’est pas tant le souci du développement que celui de la gestion ; d’abord en délocalisant sans réflexion sur les conséquences à long terme de telles pratiques ; ensuite en dépouillant progressivement l’entreprise de ses activités périphériques quitte à faire de celle-ci un arbre mort ; enfin en cherchant la synergie à tout prix avec le seul objectif obsessionnel de la rentabilité maximum et instantanée, quitte à priver l’entreprise des ressources nécessaires à la construction de son avenir. Et si l’on ajoute à tout ceci la totale absence de projets politiques et économiques publiques d’envergure, c’est-à-dire intégrant cette difficile notion du long terme, il y a vraiment de quoi s’inquiéter pour qui cherche un emploi. Oui, il faut dire que l’entreprise et les pouvoirs publics ont aussi leur part de responsabilité dans la torpeur du marché actuel !

Nous vivons en effet un incroyable paradoxe que la crise économique accentue : d’un côté, des salariés de plus en plus invités à prendre en main leur avenir et de l’autre, un marché si mal conduit, avec si peu d’esprit de développement et de créativité qu’il laisse tout un chacun dans l’angoisse terrible de celui qui a perdu son chemin !

Un paradoxe que l’on peut, malgré tout, résoudre en agissant sur deux fronts : d’une part en créant les conditions nécessaires à une meilleure prise en main du destin professionnel de chaque salarié et d’autre part en enrichissant le management de l’entreprise comme celui des institutions publiques de compétences de développeur et de créateur qu’à l’évidence, il ne possède pas suffisamment.

Pour les salariés, je suggère de mettre en place au sein de chaque entreprise une vraie réflexion sur l’état des compétences de chacun. Une réflexion guidée par le management mais intégrant la participation de chaque salarié. Avec une idée forte : celle de générer des gains de compétences liés au savoir-être. Car ce dont l’entreprise a besoin pour développer et créer davantage, ce n’est pas tant de technique que de relationnel. Alors apprenons aux salariés à rédiger sur quatre pages les éléments clés de leur valeur ajoutée comme s’il s’agissait de faire leur « plaquette commerciale » afin de les préparer à se vendre en interne comme en externe. Les deux avantages de cette technique sont de permettre au salarié de voir enfin clair sur soi et d’intégrer les autres dans cette réflexion : ceux que l’on côtoie comme ceux à qui cette valeur ajoutée ainsi dégagée est destinée. Dans ce temps de crise dans lequel l’aveuglement règne, en haut comme en bas, c’est le meilleur moyen de mobiliser chacun sur de nouveaux projets pour l’entreprise que tous peuvent partager.

Pour le management de l’entreprise, je suggère de faire le pari de la créativité pour davantage de développement. D’une part en récupérant les bienfaits de l’opération précédente faite avec les salariés et d’autre part en cherchant à muscler leur équipe de managers de profils différents. Trop de clonage assèche les entreprises. On le sait depuis longtemps, la créativité ne peut s’exercer qu’à partir de points de vue qui se sont confrontés. Encore faut-il permettre ces rencontres de profils différents dans l’entreprise, et les gérer. Aussi, décideurs de l’entreprise comme de l’institution publique, sans vouloir faire de vous des adeptes d’une nouvelle discrimination positive, osez intégrer quelques philosophes, quelques psychologues, quelques sociologues à vos équipes d’ingénieurs, d’énarques et de diplômés d’écoles de gestion. Mais oui, osez recruter quelques lettrés ! Croyez-moi, ils en savent plus que vous sur les Hommes et leurs ressorts, sur l’équilibre nécessaire entre l'économique et l'humain mais aussi sur la vision à long terme dont notre monde a tant besoin !  

 

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commentaires

L
<br /> Bonjour,<br /> <br /> Votre analyse est des plus pertinentes. Le métissage des équipes est du meilleur effet à qui sait prendre le risque d'oser ce pari. Seul cette mixité de parcours auréolée de convictions différentes<br /> mais complémentaires peut être le théâtre d'échanges constructifs favorisant un brainstorming continuel et salvateur. Bravo à vous, puissent nos dirigeants nationaux et provinciaux vous entendre !<br /> <br /> <br />
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